Comment comptabiliser les IJSS en cas de subrogation ?

Inès Lazaar
, Juriste Rédacteur en Droit social
Mise à jour le
Guide de la gestion de la paie
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Chaque année, la CPAM (Caisses Primaires d'Assurance Maladie), ou Améli, consacre plusieurs milliards d’euros au versement d’IJSS (Indemnités Journalières de Sécurité Sociale). Tout salarié cotisant à cette caisse peut en bénéficier en cas d’arrêt de travail, qu’il soit lié à une maladie professionnelle ou non.

Lorsque l’employeur pratique la subrogation, il avance ces indemnités sur le bulletin de paie, puis se fait rembourser directement par l’Assurance Maladie. Ce mécanisme impose une comptabilisation spécifique avec écritures comptables précises, indispensables pour respecter le droit du travail et éviter les sanctions fiscales.

Alors, comment comptabiliser les IJSS en cas de subrogation par l’employeur ? Dans quels comptes les enregistrer et selon quel calcul ? Suivez le guide !

Pourquoi faut-il comptabiliser les IJSS en cas de subrogation ?

La subrogation des IJSS consiste pour l’employeur à verser directement au salarié l’indemnité prévue, puis à se faire rembourser par la CPAM. Dans ce schéma, l’entreprise détient une créance sur cet organisme social et doit donc impérativement inscrire ces flux dans sa comptabilité.

Les IJSS apparaissent sur le bulletin de paie et sont versées au salarié pour leur montant net imposable, après déduction de la CSG/CRDS (Contribution Sociale Généralisée / Contribution au Remboursement de la Dette Sociale) par l’Assurance maladie.

Comme le maintien de salaire représente une avance de trésorerie pour la société, une écriture comptable le concernant est indispensable afin de refléter correctement les charges et produits liés au contrat de travail.

⚠️ Attention : l’omission de cette écriture expose l’employeur à un redressement fiscal, voire à des sanctions pénales.

📌 Qui initie la subrogation des IJSS ? La subrogation est proposée par l’employeur, mais nécessite l’accord du salarié, puisqu’il lui cède le droit de percevoir ses IJSS auprès de l’Assurance maladie. Ce mécanisme offre à l’organisation la possibilité d’avancer les indemnités journalières directement sur le bulletin de paie, puis de se faire rembourser par la CPAM. Si le salarié refuse, il reçoit ses IJSS directement de la caisse, et l’employeur n’effectue aucun versement.

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Dans quels comptes comptabiliser les IJSS subrogées ?

Comptabiliser les indemnités journalières subrogées répond à une logique simple : traduire fidèlement, en comptabilité, l’avance consentie par l’employeur et le remboursement attendu de la CPAM.

Les écritures permettent ainsi d’assurer la concordance entre le flux de trésorerie de la société, la créance sur l’organisme social et la charge de personnel enregistrée. Selon l’avancement de ce processus à trois étapes – créance, remboursement, clôture d’exercice – les comptes utilisés diffèrent.

1. Lors de la constatation de la créance

Dès l’absence du salarié, l’entreprise doit inscrire :

  • au débit du compte 4387 – Organismes sociaux, produits à recevoir ;

  • au crédit du compte 641 – Rémunération du personnel.

Cette écriture évite le décalage entre la charge supportée (versement du salaire) et le remboursement futur par la CPAM.

2. Lors du remboursement des IJSS

Quand l’Assurance maladie verse les indemnités à l’organisation, l’écriture se fait ainsi :

  • au débit du compte 512 – Banque ;

  • au crédit du compte 4387 – Organismes sociaux, produits à recevoir.

3. Lors d’un décalage en fin d’exercice

Si la société n’a pas encore reçu le remboursement à la date de clôture de l’exercice, il est recommandé d’inscrire :

  • au débit du compte 486 – Charges constatées d’avance ;

  • au crédit du compte 645 – Charges sociales.

Cette écriture sera extournée à l’ouverture de l’exercice suivant.

📝 À noter : seules les sommes significatives (et non de quelques euros) nécessitent une régularisation de ce type. Par exemple, si l’employeur a avancé 1 500 € au salarié en arrêt maladie, en pensant qu’il recevrait exactement cette somme d’IJSS, et que la CPAM verse finalement 1 498 € (soit 2 € d’écart), cette différence minime n’oblige pas l’employeur à faire une régularisation. En revanche, si l’écart est de 200 € ou 300 €, l’employeur doit ajuster la paie (retenue ou versement complémentaire) car la somme est jugée “significative”.

Comptabiliser les IJSS en cas de subrogation : exemples d’écritures comptables

Afin d’illustrer les écritures comptables des IJSS en cas de subrogation, PayFit vous présente un exemple d’écriture comptable.

Constatation de la créance détenue par l’entreprise envers les organismes sociaux

Numéro de compte Numéro de compte Libellés Montant Montant
Débit Crédit Débit Crédit
4387 Organismes sociaux - Produits à recevoir
641 Rémunération du personnel

Remboursement des indemnités

Numéro de compte Numéro de compte Libellés Montant Montant
Débit Crédit Débit Crédit
512 Banque
4387 Organismes sociaux - Produits à recevoir

Ajustement des charges à récupérer si l’exercice est clôturé

Numéro de compte Numéro de compte Libellés Montant Montant
Débit Crédit Débit Crédit
486 Charges constatées d’avance
645 Charges sociales

La comptabilisation des différents flux financiers qui s'effectue au sein de la structure est primordiale afin de refléter une image comptable fidèle à la réalité. Ces flux peuvent se rattacher à différents domaines de la vie de l'entreprise : le paiement des salaires, l'attribution d'avantages aux salariés, le paiement des cotisations salariales et patronales. C'est pour cette raison, par exemple, que l'on procède à la comptabilisation des tickets-restaurant et à l’enregistrement comptable du prélèvement à la source.

Comment la subrogation impacte-t-elle la fiche de paie du salarié ?

Sur le bulletin de salaire, l’indemnité apparaît distinctement du salaire brut. Cette somme est soumise à un calcul de CSG/CRDS et figure dans le revenu imposable du membre du personnel.

Le maintien de salaire prévu au contrat ou par la prévoyance peut compléter les IJSS. Ainsi, le salarié perçoit une rémunération nette ajustée, sans avoir à attendre le versement direct.

5 conseils pratiques pour gérer les IJSS en entreprise

La gestion des indemnités journalières de Sécurité sociale requiert la mise en place de quelques bonnes pratiques, afin d’éviter les erreurs de paie, d’optimiser la comptabilité et de respecter les obligations légales.

1. Vérifier systématiquement la subrogation

Il est important de s’assurer que le salarié a émis son accord pour bénéficier d’une subrogation. Noter la date de début et de fin de l’arrêt permet de calculer correctement le brut, le net imposable et le maintien de salaire.

2. Tenir à jour les comptes comptables

Il faut inscrire la créance sur le compte 4387 dès le versement au salarié, puis enregistrer le remboursement au débit du compte 512 – banque, crédit du compte 4387, à réception des fonds. Aussi, prévoyez, si nécessaire, un ajustement en fin d’exercice via le compte 486 – charges constatées d’avance.

3. Anticiper les impacts sur la paie

L’intégration des IJSS sur le bulletin de paie se fait avec mention du montant brut, net et imposable. Vérifiez que les cotisations de prévoyance sont correctement calculées, en particulier si le salarié perçoit un complément de salaire, puis ajustez le taux de prélèvement et la fiscalité si nécessaire.

4. Automatiser le suivi et les régularisations

Utiliser un logiciel de gestion de paie fiable, comme PayFit, permet d’automatiser les écritures et d’éviter les erreurs. Grâce à la génération d’un rapport mensuel des IJSS subrogées, vous pouvez suivre les remboursements et anticiper les écarts.

Toute régularisation doit être documentée en fin d’exercice pour faciliter les audits et le contrôle fiscal.

5. Communiquer avec les salariés

Expliquez clairement la subrogation et son incidence sur le bulletin de paie à vos collaborateurs. Informez-les sur les délais de remboursement et sur la somme nette perçue, afin d’instaurer une politique de transparence, de gagner leur confiance et d’éviter les malentendus.

Quelles perspectives d’évolution pour les IJSS en 2025-2026 ?

Selon un rapport publié par la Cour des comptes, les dépenses liées aux arrêts de travail, incluant les IJSS, ont atteint 12 milliards d’euros en 2022, contre 7, 7 milliards d’euros en 2017, soit une hausse de 56 % en cinq ans. Cette évolution souligne un enjeu de maîtrise des coûts qui suscite des réflexions, notamment sur l’allongement du délai de carence ou la durée maximale d’indemnisation.

Baisse du plafond de calcul des IJSS à compter du 1er avril 2025

Le décret n°2025-160 (21 février 2025) modifie significativement les modalités de calcul des IJSS : le plafond des revenus pris en compte passe de 1, 8 à 1, 4 fois le SMIC mensuel.

Concrètement, cela se traduit par une baisse du montant maximal de l’indemnité journalière : il est passé de 53, 31 € brut/jour à 41, 47 € brut/jour pour les arrêts maladie débutant à compter du 1er avril 2025.

Des conséquences significatives pour les employeurs et les salariés

Pour les salariés dont le salaire dépasse ce nouveau plafond, l’IJSS couvre désormais une part réduite de la rémunération. Les entreprises devront donc compléter davantage via les régimes de prévoyance ou les accords collectifs afin d’assurer un maintien du salaire pendant l’arrêt de travail.

Cette réforme pourrait entraîner une augmentation des coûts de prévoyance pour les entreprises. Une partie de ce surcoût pourrait être répercutée sur les salariés via une hausse de leurs cotisations salariales, en particulier pour les plus jeunes et les plus précaires.

Revalorisation du plafond de la Sécurité sociale (PASS)

Par ailleurs, dès le 1er janvier 2025, le Plafond Annuel de la Sécurité Sociale (PASS) est revalorisé de 1, 6 %, pour atteindre 47 100 € par an (soit 3 925 € mensuels).

Cette hausse, même si elle ne compense pas la baisse du plafond spécifique aux IJSS, peut influencer certains calculs et indices liés à la couverture sociale et aux régimes complémentaires.

Quel impact sur les pratiques de prescription médicale ?

Une mesure intéressante en lien indirect avec les IJSS : les dispositifs MSO / MSAP (Médecins prescripteurs Sous Objectif ou d’Accompagnement Patient) ont conduit entre 2022 et 2024 à une réduction de 30 % du nombre d’IJ prescrites par patient actif, pour les médecins concernés par ces dispositifs.

Cette tendance pourrait se prolonger en 2026, avec un potentiel impact sur le volume des indemnités journalières remboursées.

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Les IJSS sont-elles toujours imposables ?

Oui, les indemnités journalières de la Sécurité sociale sont toujours imposables, au même titre que le salaire, sauf dans le cas d’une ALD (Affection Longue Durée) qui est partiellement exonérée.

L’employeur peut-il refuser la subrogation ?

Oui, la subrogation des IJSS est facultative, sauf si un accord d’entreprise, la convention collective applicable, le contrat de travail ou un régime de prévoyance impose à l’organisation son application.

Quelles aides peuvent impacter la comptabilisation des IJSS ?

Durant la crise sanitaire de la Covid-19, par exemple, des arrêts dérogatoires ont été pris en charge par la Sécurité sociale. Leur traitement comptable a suivi le même schéma que les IJSS classiques, avec parfois un taux d’indemnité différent selon la date et la réglementation en vigueur.