Quelle est la procédure à suivre pour un licenciement économique ?

La législation française définit le licenciement économique comme une rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur pour des motifs non inhérents au salarié. Ce type de fin de contrat de travail intervient généralement en raison de difficultés économiques, de mutations technologiques ou de réorganisations nécessaires à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise.
Lors d’une mise en œuvre d’une procédure de licenciement économique, il arrive que certains salariés soient licenciés alors même qu’ils ne sont pas visés. En effet, le licenciement économique vise à supprimer des postes et non pas à se séparer de certains collaborateurs en particulier.
Quelle est la procédure de licenciement pour motif économique ? PayFit vous explique tout ce qu’il faut savoir : étapes, durées, conditions, etc.
Dans quels cas l'employeur peut-il recourir au licenciement économique ?
L'article L1233-3 du Code du travail stipule que le licenciement économique doit être justifié par des motifs de cet ordre, non inhérents à la personne du salarié, résultant d'une suppression, d'une transformation d'emploi ou d'une modification d'un élément essentiel du contrat refusé par le salarié. Ainsi, l’employeur peut avoir recours au licenciement pour motif économique en cas de :
difficultés économiques : baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires, pertes d'exploitation, dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, situations qui réduisent fortement la capacité de l’entreprise à assurer le paiement des salaires sur une durée significative ;
mutations technologiques : introduction de nouvelles technologies impactant l'emploi ;
réorganisation de l'entreprise dans le but de sauvegarder sa compétitivité sur le marché ;
cessation d'activité : arrêt total de l'activité de l'entreprise, non imputable à une faute de l'employeur.
Le licenciement économique peut être individuel ou collectif. Il est classé en trois catégories :
licenciement individuel : concerne un seul salarié ;
petit licenciement collectif : de 2 à 9 salariés sur une période de 30 jours ;
grand licenciement collectif : au moins 10 salariés sur une période de 30 jours.
💡 Bon à savoir : la procédure de licenciement économique concerne uniquement les salariés en CDI (Contrat à Durée Indéterminée).
Quelles sont les étapes de la procédure de licenciement économique ?
Le licenciement économique est une procédure qui requiert beaucoup de rigueur. L’employeur doit suivre toutes ces étapes afin de rester en conformité et éviter toute poursuite au conseil de prud’hommes.
Étape 1 : Consultation du CSE
L'employeur doit consulter le CSE (Comité Social et Économique), s’il existe, avant toute décision de licenciement économique, en organisant obligatoirement :
une réunion dans le cadre d’un petit licenciement collectif ;
au moins deux réunions, espacées d'au moins 15 jours, lors des grands licenciements collectifs.
⚠️ Attention : en l'absence d’un CSE, l'employeur est dispensé de consultation, si l'entreprise compte moins de 11 salariés ou si un procès-verbal de carence atteste de l'impossibilité de mettre en place le CSE.
💡 Bon à savoir : en plus de la consultation du CSE, l’autorisation de l’inspection du travail est requise avant le licenciement d’un représentant du personnel.
📌 À retenir :
entreprise de 11 salariés ou plus avec un CSE en place : la consultation du CSE est obligatoire avant de notifier tout licenciement économique, même s’il ne concerne qu’un seul salarié ;
entreprise de 11 salariés ou plus sans CSE : l’absence de consultation peut entraîner une irrégularité de procédure, voire l’annulation du licenciement ;
entreprise de moins de 11 salariés : il n’y a pas d’obligation de consultation, car le CSE n’est pas requis dans les très petites structures.
Étape 2 : Information des DREETS et des sous-traitants
L’employeur a des obligations d'information à la fois envers la DREETS (Direction Régionale de l'Économie, de l'Emploi, du Travail et des Solidarités), ex-DIRECCTE, et éventuellement envers les sous-traitants, mais pas dans toutes les procédures de licenciements économiques.
➡️ Obligation d’information de la DREETS (ex-DIRECCTE)
L’article L1233-19 du Code du travail exige de l’employeur de notifier le licenciement économique à l'administration (la DREETS) après avoir consulté le CSE, s’il existe. Cette obligation est effective dans tous les cas de licenciement économique, même individuel, et de fait en ligne via la plateforme TéléRC.
Dans le cadre d’un grand licenciement économique, la procédure veut que :
l’employeur doit attendre 30 jours après avoir informé la DREETS pour envoyer les lettres de licenciement (étape 6) lorsqu’il envisage de licencier entre 10 et 49 salariés ;
pour 50 licenciements ou plus, il doit attendre que la DREETS ait validé ou homologué un PSE pour notifier les salariés licenciés.
💡 Bon à savoir : pendant ce temps d’attente, l’employeur ne peut pas encore licencier les salariés (c’est-à-dire qu’il ne peut pas envoyer les lettres de rupture du contrat). En revanche, il peut mener les entretiens préalables (étape 5) et organiser les procédures internes.
Pour un licenciement individuel ou de moins de 10 salariés, il faut informer l’administration dans les 8 jours suivant la notification de licenciement.
➡️ Information des sous-traitants
Informer les sous-traitants d’une procédure de licenciement économique n’est pas une obligation légale systématique, mais une bonne pratique dans le cadre d’un PSE (Plan de Sauvegarde de l’Emploi) ou d’un grand projet de restructuration susceptible d’avoir une incidence sur les co-contractants.
L’information des sous-traitants a pour intérêt d’anticiper les dommages indirects causés par un licenciement économique (baisse d'activité, réorganisation des prestations). Parfois, cela est prévu dans les clauses contractuelles entre donneurs d’ordres et sous-traitants.
En cas de licenciement économique individuel, il n’y a aucune obligation légale d’informer les sous-traitants.
Étape 3 : Adaptation à l’évolution de l’emploi et recherche de reclassement
L’employeur doit, avant d’envisager un licenciement, mettre en œuvre toutes les mesures nécessaires pour éviter autant que possible la rupture des contrats de travail. Cela fait partie intégrante de la procédure de licenciement, surtout en cas de licenciement économique.
L’adaptation des salariés à l’évolution de leur emploi est une priorité. Par exemple, si un poste est supprimé ou transformé dans le cadre d’un projet d’automatisation, les salariés concernés peuvent bénéficier d’une formation professionnelle, afin d’acquérir de nouvelles compétences et de favoriser la sauvegarde de leur emploi au sein de l’entreprise.
Ainsi, le reclassement interne doit être étudié sérieusement. Le salarié peut également bénéficier, selon la situation de l’entreprise et la nature du motif, d’un congé de reclassement ou d’un Contrat de Sécurisation Professionnelle (CSP). Ces dispositifs permettent d’accompagner la transition professionnelle du salarié licencié, dans le respect des obligations prévues par le Code du travail.
⚠️ Attention : le défaut de recherche de reclassement, l’un des critères clés de la validation d’un PSE), peut entraîner l'annulation du licenciement.
Étape 4 : Convocation à l'entretien préalable
Une fois les critères d'ordre du licenciement économique et la procédure déterminés, l'employeur convoque le salarié à un entretien préalable par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre contre décharge. Un délai minimum de 5 jours ouvrables doit être respecté entre la réception de la convocation et la date de l'entretien.
La convocation à l’entretien préalable de licenciement doit indiquer :
l’objet de la convocation ;
la date et l’heure de l’entretien ;
le lieu de l’entretien ;
le droit pour le salarié de se faire assister.
💡 Bon à savoir : selon l’article L1233-36 du Code du travail, l’entretien préalable individuel est obligatoire pour chaque salarié dans le cadre d’un licenciement économique, y compris collectif, sauf si :
au moins 10 licenciements économiques sont envisagés sur 30 jours ;
ET
l’entreprise dispose d’un CSE ;
ET
l’entreprise est tenue d’élaborer un PSE.
👉 Dans ce seul cas, l’entretien préalable au licenciement n’est pas obligatoire, sauf pour les salariés protégés, employés bénéficiant d’une protection particulière contre le licenciement, en raison de leurs fonctions représentatives ou de leur mandat syndical ou électif. Cette protection vise à éviter que leur engagement pour défendre les droits des salariés ne les expose à des représailles. Leur licenciement requiert une autorisation de l’inspection du travail (DREETS).
Situation | Entretien préalable obligatoire ? |
---|---|
Licenciement économique individuel | ✅ Oui |
Licenciement économique < 10 salariés | ✅ Oui |
Licenciement ≥ 10 salariés sans PSE | ✅ Oui |
Licenciement ≥ 10 salariés avec PSE | ❌ Non (sauf salariés protégés) |
Étape 5 : Entretien préalable de licenciement économique
Lors de cet entretien, l'employeur expose les motifs économiques du licenciement et recueille les observations du salarié. Ce dernier a le droit de se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise ou, en l'absence de représentants du personnel, par un conseiller du salarié (s’il ne maîtrise pas l’art de la négociation).
De son côté, l’employeur peut se faire représenter, notamment par un responsable des ressources humaines, et se faire assister par un membre du personnel de l’entreprise. Il ne peut toutefois pas faire appel à un avocat.
💡 Bon à savoir : le salarié licencié n’est pas obligé de se présenter à l’entretien préalable de licenciement économique. Il n’a pas, non plus, à informer son employeur de son absence.
Étape 6 : Notification du licenciement
Après l'entretien, l'employeur notifie le licenciement par lettre recommandée avec accusé de réception. Les délais à respecter sont de :
7 jours ouvrables pour un salarié non-cadre ;
15 jours ouvrables pour un cadre.
La lettre de licenciement doit mentionner :
les motifs économiques du licenciement ;
la priorité de réembauche au sein de l’entreprise ou du groupe d’entreprises ;
le cas échéant, la proposition de contrat de sécurisation professionnelle ou CSP ;
et, pour les entreprises de plus de 1 000 salariés, la possibilité d’un congé de reclassement à accepter dans les 8 jours.
💡 Bon à savoir : être licencié pour motifs économiques donne le droit au salarié congédié de bénéficier d'une priorité pour être réembauché dans l'entreprise sur des postes compatibles avec sa qualification, pendant un an.
Étape 7 : Préavis de licenciement
Une fois la lettre de licenciement économique notifiée, le salarié licencié doit effectuer un préavis dont la durée dépend de son ancienneté et de sa convention collective. Il commence le lendemain de la première présentation de la lettre de licenciement par courrier recommandé.
👉 À noter : l’employeur peut dispenser un salarié d’effectuer son préavis, auquel cas ce dernier perçoit une indemnité compensatrice.
Aucun préavis n’est à effectuer, si le salarié accepte un CSP, un congé de reclassement, dans les entreprises de plus de 1 000 salariés, ou un congé de mobilité, prévu par accord collectif.
Étape 8 : Rupture du contrat et documents de fin de collaboration
À l'issue du préavis, le contrat de travail est rompu. L'employeur remet alors au salarié :
l'attestation France Travail (ex-Pôle Emploi) ;
le reçu pour solde de tout compte ;
le document récapitulatif de l'épargne salariale, le cas échéant.
Le salarié licencié pour motif économique peut bénéficier de différents types d’indemnités. Pour connaître les modalités précises du calcul de l'indemnité de licenciement économique, voici les différentes indemnités possibles :
indemnité légale de licenciement : 1/4 de mois de salaire par année d'ancienneté jusqu'à 10 ans, puis 1/3 au-delà ;
indemnité compensatrice de préavis, si le préavis n'est pas effectué ;
indemnité compensatrice de congés payés pour les congés non pris ;
indemnité supra-légale, si prévue par la convention collective ou négociée.
💡 Bon à savoir : l'indemnité légale est exonérée d'impôt sur le revenu dans certaines limites.
Exemples des conditions de licenciement économique dans les conventions collectives
La procédure du licenciement économique peut différer en fonction de la convention collective applicable à l’entreprise.
Convention collective HCR (Hôtels-Cafés-Restaurants)
En cas de licenciement économique, la procédure établie par la convention HCR prévoit une indemnité de licenciement généralement plus favorable que le minimum légal après un an d’ancienneté. Le salarié peut aussi bénéficier d’un préavis dont la durée dépend de son ancienneté, sauf dispense de l’employeur.
Aucune disposition spécifique sur un congé de reclassement, mais l’accès au CSP est maintenu pour les entreprises de moins de 1 000 salariés. Le respect de la procédure prévue par le Code du travail reste impératif.
Convention collective Syntec
Dans la convention Syntec, le licenciement économique doit impérativement faire l’objet d’un entretien préalable. Le salarié peut bénéficier d’un accompagnement renforcé pour le reclassement, avec parfois des accords d’entreprise proposant un bilan de compétences ou une formation de reconversion.
Le salarié licencié dans le cadre de cette convention peut bénéficier d’une indemnité de licenciement plus avantageuse que celle du droit commun selon l’ancienneté. Une attention particulière est portée aux critères d’ordre des licenciements (anciennet é, charges de famille, compétences, etc.).
Convention collective Audiovisuel (IDCC 2642 – salariés de la production audiovisuelle)
Dans le secteur de l’art audiovisuel, le recours au licenciement économique implique une justification rigoureuse des motifs (baisse d’activité durable, réorganisation…). Le salarié peut bénéficier de dispositifs spécifiques d'accompagnement, notamment s’il relève de structures soutenues par des fonds de soutien à l'emploi.
La collective de l'audiovisuel s'aligne sur le Code du travail en termes de préavis, d’indemnité et d’obligations de reclassement, mais certaines entreprises peuvent prévoir des accords internes plus favorables (PSE allégé, congé mobilité).
Le CSP est proposé aux salariés licenciés pour motif économique dans les entreprises de moins de 1 000 salariés ou en redressement/liquidation judiciaire. Il offre un accompagnement renforcé vers le retour à l'emploi et le versement d'une allocation spécifique. Le salarié dispose de 21 jours pour accepter le CSP.
La durée d’un licenciement économique varie selon le nombre de salariés concernés et la taille de l'entreprise. Elle peut s'étendre de quelques semaines à plusieurs mois, notamment en cas de PSE ou si l’entreprise doit attendre l’accord de l’inspection de travail, mener les entretiens préalables, etc.
Oui, le salarié est en droit de contester la rupture de son contrat de travail, mais aussi de dénoncer le non-respect de la procédure de licenciement économique. Le salarié licencié dispose d’un délai de 12 mois à compter de la notification du licenciement pour saisir le conseil de prud'hommes.