En quoi consiste la mise à pied ?

Dans l’entreprise, le pouvoir disciplinaire de l'employeur lui permet de sanctionner les salariés fautifs. Il dispose d’une échelle de sanction adaptée à la gravité de chaque faute qu’ils pourraient commettre.
Parmi les sanctions les plus sévères, la mise à pied permet de suspendre le contrat de travail et d'interdire le salarié fautif de rejoindre son poste.
Selon le Code du travail, la mise à pied doit s'inscrire dans un cadre légal strict que l'employeur est tenu de respecter avant de mettre en place ce type de mesure dans l’entreprise.
Qu’est-ce qu’une mise à pied ? En existe-t-il plusieurs types ? Quels sont les motifs qui justifient cette sanction ? PayFit fait le point.
Mise à pied : définition
La mise à pied est avant tout une mesure prise par l'employeur à l’encontre d’un salarié fautif, qui s’inscrit dans l’arsenal disciplinaire prévu par le Code du travail. En pratique, les responsables utilisent la mise à pied lorsque la faute commise empêche le maintien du travailleur dans son poste de travail.
Toutefois, la mise à pied n’est pas nécessairement une sanction. Il est alors bon de distinguer :
la mise à pied disciplinaire : une sanction disciplinaire ;
la mise à pied conservatoire : une mesure temporaire que prononce l’employeur dans l’attente d’une décision définitive.
Ces deux procédures entraînent l’application de régimes spécifiques et distincts. C’est pourquoi l’employeur doit déterminer à l’avance s’il prononce une mise à pied à titre conservatoire ou disciplinaire.
Quelles sont les différences entre les deux types de mise à pied ?
Mise à pied disciplinaire
Elle vise à sanctionner un salarié qui a commis une faute assez grave pour justifier de l’écarter de son poste de travail pendant une durée déterminée.
Logiquement, s’agissant d’une sanction disciplinaire, l’employeur doit respecter la procédure prévue par le Code du travail.
La durée maximale de la mise à pied disciplinaire et ses modalités doivent être prévues dans le règlement intérieur de l’entreprise pour que cette dernière soit valable.
⚠️ Attention : avant d'initier une procédure de mise à pied disciplinaire, l'employeur doit également respecter les dispositions de la convention collective applicable et vérifier que celle-ci n’impose pas de durée maximale spécifique.
Il s’agit donc d’une sanction disciplinaire sévère, puisqu’elle entraîne la suspension du contrat de travail. Les effets immédiats de cette décision se traduisent par :
l’absence du salarié de l’entreprise ;
Le salarié est en droit de connaître la durée de la mise à pied disciplinaire ainsi que la date de début et de fin de son absence.
Pendant la mise à pied disciplinaire, il reste soumis à son obligation de loyauté et de discrétion professionnelle. Concernant la possibilité de travailler pour un autre employeur pendant la procédure :
si le salarié est lié par une clause de non-concurrence, celle-ci continue de s'appliquer ;
en l'absence de clause de non-concurrence, il peut légalement travailler pour un autre employeur pendant sa mise à pied, sous réserve de respecter son obligation de loyauté (pas de concurrence déloyale) ;
le salarié doit s'assurer que cette activité ne l'empêchera pas de reprendre son travail à l'issue de ce délai.
💡 Bon à savoir : un travailleur peut être en mise à pied disciplinaire en même temps qu’il est en arrêt maladie. Quand bien même le paiement du salaire est interrompu, il peut tout de même prétendre au versement des indemnités journalières de la Sécurité sociale pendant ce temps.
Mise à pied conservatoire
Ce cas ne relève pas d'une sanction, mais d’une mesure provisoire. En effet, pour pouvoir sanctionner une faute par une mise à pied disciplinaire, l’employeur doit respecter une procédure qui prend un certain temps.
Or, s’il constate une faute qui justifie une procédure avec exclusion immédiate du salarié, il peut prononcer une mesure conservatoire dans l’attente d’enquêter et de déterminer la sanction disciplinaire définitive. C’est pourquoi la durée est en général indéterminée (elle dure le temps du déroulement de la procédure disciplinaire).
La mise à pied conservatoire peut être communiquée au salarié par tout moyen, même oralement. En pratique, la convocation de ce dernier à l’entretien préalable contient la notification de la mesure conservatoire en attente de l’entretien.
Attention, le prononcé de la mise à pied conservatoire s’accompagne obligatoirement de l’engagement de la procédure disciplinaire. Si l’employeur met trop de temps à convoquer le salarié, celle-ci peut être requalifiée en mise à pied disciplinaire.
À la fin de la procédure engagée en parallèle de la mise à pied conservatoire, l’employeur devra décider la suite qu’il donne aux faits fautifs, entre :
ne pas prononcer de sanction (rare en pratique) ;
la mise à pied disciplinaire ;
le licenciement pour faute grave ou lourde ;
le licenciement pour cause réelle et sérieuse.
En fonction de la mesure disciplinaire qui est finalement adoptée, la mise à pied conservatoire peut être rémunérée ou pas. En principe, si elle a été prononcée à tort, cette période doit être rémunérée. Toutefois, si elle débouche sur une mise à pied disciplinaire, elle ne le sera pas.
Quel délai entre la mise à pied conservatoire et le licenciement ?
Selon la jurisprudence récente, un délai de 6 à 7 jours entre la notification de la mise à pied conservatoire et la convocation à l'entretien préalable de licenciement est considéré comme raisonnable. Une fois la procédure engagée, deux délais légaux s'imposent :
Un minimum de 5 jours ouvrables entre la convocation et l'entretien ;
Un maximum d'un mois entre l'entretien et la notification du licenciement.
⚠️ Attention : bien que la mise à pied conservatoire doive être suivie d'une procédure disciplinaire pouvant aboutir à différentes sanctions, celle-ci ne débouche pas nécessairement sur un licenciement.
Comment procéder à la mise à pied conservatoire d’un salarié protégé ?
La mise à pied conservatoire d'un salarié protégé (représentant du personnel, délégué syndical, etc.) obéit à des règles particulières. En cas de faute grave, l'employeur peut prononcer une mise à pied conservatoire, mais celle-ci ne peut durer que jusqu'à la décision de l'inspecteur du travail.
En effet, le licenciement d'un salarié protégé nécessite l'autorisation préalable de l'inspection du travail. Si cette autorisation est refusée, la mise à pied conservatoire est automatiquement annulée et ses effets sont supprimés de plein droit. Dans ce cas, l'employeur doit lui verser l'intégralité des salaires correspondant au temps de mise à pied conservatoire.
⚠️ Attention : la mise à pied conservatoire du salarié protégé doit s'accompagner de l'engagement immédiat de la procédure de licenciement et de la saisine de l'inspection du travail. Tout retard injustifié peut entraîner la requalification de la mise à pied conservatoire en sanction disciplinaire.
Quelle est la procédure à respecter pour sanctionner un salarié par une mise à pied ?
Le responsable qui souhaite prononcer une mise à pied disciplinaire doit obligatoirement respecter une procédure qui comprend les étapes suivantes :
Identifier et vérifier que la faute est d’une gravité suffisante pour justifier une mise à pied ;
Convoquer le salarié à un entretien par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre contre récépissé. Cette convocation à l’entretien préalable à une sanction disciplinaire précise l’objet, la date, l’heure et le lieu de l’entretien et rappelle que ce dernier peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise ;
Lors de cet entretien, le responsable communique au salarié les motifs de la sanction envisagée et recueille ses explications ;
Notifier la sanction au salarié par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre contre récépissé, au minimum 2 jours ouvrables et au maximum 1 mois après l’entretien.
💡 Bon à savoir : toutes les sanctions disciplinaires ne doivent pas strictement respecter cette procédure. Par exemple, l'avertissement de travail ne demande pas d’entretien préalable.
La lettre de mise à pied disciplinaire doit obligatoirement préciser la durée de la sanction retenue.
Quelles sont les conséquences d’une mise à pied sur les droits du salarié ?
Suite au prononcé de la mise à pied, la paie n’est plus versée. Logiquement, cette absence n’a pas seulement un impact sur le salaire de base, mais peut également générer plusieurs conséquences importantes sur la situation professionnelle et sociale de la personne concernée.
Sur le plan de la rémunération, la première conséquence est l'interruption du versement de la paie qui ne se limite pas au salaire de base, mais s'étend également aux éléments variables de la rémunération.
Ainsi, le salarié ne peut ni effectuer d'heures supplémentaires, ni percevoir les primes liées à sa présence effective. En effet, la période de mise à pied n’est généralement pas prise en compte dans le calcul de la participation et de l'intéressement.
Concernant les congés et l'ancienneté, la périodicité qui encadre la mise à pied n'est pas considérée comme du temps de travail effectif. Par conséquent, elle n'ouvre pas droit à l'acquisition de congés payés et elle est majoritairement neutralisée dans le calcul de l'ancienneté. L'impact sur les RTT dépendra quant à lui des modalités définies dans les accords d'entreprise.
💡 Bon à savoir : malgré la suspension du contrat, la protection sociale du salarié est généralement maintenue pendant la mise à pied. Il conserve ainsi le bénéfice de sa couverture maladie, de son droit à la retraite et reste couvert par le régime de prévoyance de l'entreprise.
S'agissant des avantages sociaux, certains sont suspendus tandis que d'autres sont maintenus. Les titres-restaurant ne sont pas dus pour les jours non travaillés, mais le salarié conserve ses droits aux prestations du comité social et économique ainsi que sa couverture mutuelle et prévoyance.
⚠️ Attention : il est essentiel de consulter la convention collective applicable, car elle peut prévoir des dispositions spécifiques quant au maintien des droits du salarié.
Peut-on contester une mise à pied ?
La mise à pied disciplinaire a de fortes conséquences sur la relation de travail et peut donc être contestée par le salarié :
Au moyen d’une lettre de contestation adressée à son responsable ;
Devant le conseil des prud’hommes en présence ou non d’un avocat.
Les juges vérifieront que la mise à pied est justifiée, régulière et proportionnée, faute de quoi elle peut être annulée rétroactivement.
⚠️ Attention : face à une contestation de mise à pied, le responsable ne doit pas rester silencieux. Comme pour la contestation d'un avertissement, une réponse de l’employeur argumentée est nécessaire pour justifier la sanction et éviter tout risque de contentieux.
Pour limiter les risques de contestation devant les prud'hommes, le responsable doit veiller à :
documenter précisément les faits reprochés ;
respecter scrupuleusement la procédure disciplinaire ;
vérifier la proportionnalité entre la faute et la durée de la mise à pied ;
conserver tous les échanges et documents liés à la démarche en cours ;
s'assurer que les mêmes faits n'ont pas déjà fait l'objet d'une sanction ;
respecter les délais légaux de prescription des événements fautifs.
💡 Bon à savoir : la mise à pied conservatoire n’est pas directement contestée : les salariés attendent généralement le prononcé de la sanction définitive.
La durée d’une mise à pied disciplinaire est généralement de 3 à 5 jours ouvrés. Elle peut s’élever jusqu’à 8 ou 15 jours dans les cas les plus graves. La durée maximale prévue par la convention collective et le règlement intérieur doit être respectée sous peine de sanction par les prud’hommes.
Les faits graves rendant impossible le maintien du salarié dans l’entreprise peuvent prendre de nombreuses formes : comportement délictuel, violence physique ou verbale, harcèlement moral ou sexuel, fraude, abandon de poste, état d’ébriété avancé ou encore violation grave du règlement intérieur de l’entreprise.
En cas d’abus de procédure de mise à pied conservatoire, elle peut être requalifiée et devenir disciplinaire. L’employeur est ainsi dans l’impossibilité de prononcer un licenciement ultérieur en raison du principe de prohibition des doubles peines. Il est également dans l’obligation de payer les salaires non versés pendant la suspension ainsi que les indemnités légales et les potentiels dommages-intérêts pour préjudice.