Licenciement pour insuffisance professionnelle : quel est son fonctionnement ?
Le licenciement pour insuffisance professionnelle est un mode de rupture du contrat de travail qui peut être prononcé à l’encontre d’un salarié lorsque ce dernier est dans l’incapacité d’effectuer le travail pour lequel il a été embauché.
Ce type de licenciement répond à une procédure précise qui doit être suivie par l’employeur. Le licenciement doit notamment être fondé sur une cause réelle et sérieuse.
Comment licencier un salarié pour insuffisance professionnelle ? Quels sont les motifs de licenciement pour insuffisance professionnelle ? PayFit vous explique.
Qu’est-ce qu’un licenciement pour insuffisance professionnelle ?
Comme le précise le Code du travail, le licenciement pour insuffisance professionnelle résulte d’un comportement non-fautif du salarié. Il s'agit donc d’un licenciement pour motif personnel non-disciplinaire.
On parle d’insuffisance professionnelle lorsque le salarié n’arrive pas à réaliser les tâches qui lui sont confiées conformément à ses qualifications et à son poste.
⚠️ Attention : il ne faut pas confondre l’insuffisance professionnelle et l’insuffisance de résultat, qui se caractérise lorsque le salarié n’arrive pas à atteindre les objectifs qui lui sont fixés.
À noter que l'insuffisance professionnelle doit être bien distinguée de la faute. Contrairement au licenciement pour faute ou au licenciement pour faute grave qui sanctionnent un comportement fautif délibéré du salarié, l'insuffisance professionnelle caractérise une incapacité non intentionnelle à atteindre le niveau de compétence requis pour le poste.
L’insuffisance professionnelle doit être fondée sur des faits objectifs, précis et matériellement vérifiables. Ces faits doivent être imputables au salarié, et ne doivent pas résulter d’une faute de l’employeur ou d’un autre salarié.
Exemple : l’employeur qui ne fournit pas les outils nécessaires au salarié pour réaliser ses missions ne peut pas lui reprocher ensuite de ne pas les avoir réalisées.
⚠️ Attention : l’insuffisance professionnelle ne doit pas résulter du fait que :
l’employeur ait embauché le salarié alors qu’il n’était pas qualifié pour ce poste ;
l’employeur ait fourni une charge de travail excessive ;
l’employeur ait manqué à son obligation de formation continue ;
le travail fourni ne relève pas de la qualification du salarié.
Dans ces situations, le salarié peut contester la décision devant les Prud'hommes et obtenir la requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse, ce qui expose l'employeur à des sanctions financières importantes.
Enfin, l’insuffisance professionnelle ne doit pas résulter d’une inaptitude médicale. Si le salarié est reconnu comme inapte à son travail par le médecin du travail, l’employeur doit respecter la procédure de licenciement pour inaptitude.
Comment prouver l'insuffisance professionnelle ?
Les éléments objectifs requis
Pour être considéré comme valable, le licenciement pour insuffisance professionnelle doit reposer sur des éléments concrets et vérifiables. L'employeur doit constituer un dossier solide démontrant de manière objective les difficultés du salarié à réaliser ses missions.
Ces preuves peuvent prendre différentes formes :
des rapports d'évaluation mettant en évidence une performance insuffisante ;
des documents attestant d'erreurs professionnelles répétées ;
des témoignages circonstanciés de clients ou collaborateurs.
Les comptes-rendus d'entretiens d'évaluation sont également essentiels pour établir un historique des lacunes constatées. Dans certains cas, des statistiques comparatives de performance peuvent venir étayer le dossier, à condition qu'elles soient pertinentes et équitables.
💡 Bon à savoir : tous ces éléments doivent être contemporains au licenciement et directement liés aux compétences requises pour le poste. Des faits trop anciens ou isolés ne peuvent pas justifier à eux seuls un licenciement pour insuffisance professionnelle.
Au-delà de la constitution du dossier, l'employeur doit démontrer qu'il a mis en place un véritable plan d'accompagnement. Celui-ci doit inclure des actions de formation adaptées aux difficultés constatées et un suivi régulier avec le manager direct. Des points d'étape doivent être formalisés pour mesurer les progrès ou l'absence d'amélioration, en laissant un délai raisonnable au salarié pour progresser.
Les cas où l'insuffisance ne peut pas être retenue
La jurisprudence précise plusieurs situations dans lesquelles l'insuffisance professionnelle ne peut pas être valablement invoquée. Ces situations se répartissent en trois grandes catégories.
Premier cas
Lorsque l'employeur n'a pas mis en place l'accompagnement nécessaire. L'absence de fiche de poste claire, la non-réalisation des entretiens annuels obligatoires ou encore le manque de formation sur les nouveaux outils constituent des manquements qui fragilisent la procédure de licenciement pour insuffisance professionnelle.
Deuxième cas
Un contexte professionnel défavorable peut expliquer les difficultés du salarié. Une réorganisation récente du service, des changements fréquents de management ou un sous-effectif chronique dans l'équipe sont autant d'éléments qui peuvent justifier une baisse temporaire de performance et invalider le recours au licenciement.
Troisième cas
Certains facteurs externes peuvent impacter significativement la performance sans que cela relève d'une insuffisance professionnelle. Il peut s'agir de difficultés du marché affectant toute l'équipe, de problèmes techniques récurrents ou de changements importants dans l'environnement de travail.
⚠️ Attention : en cas de contentieux, la charge de la preuve repose entièrement sur l'employeur. Celui-ci doit non seulement démontrer le caractère réel et sérieux de l'insuffisance, mais aussi prouver l'absence de causes externes justifiant les difficultés et la mise en place d'actions d'accompagnement adaptées.
Quelle est la procédure de licenciement pour insuffisance professionnelle ?
L’employeur ne peut pas procéder à un licenciement pour insuffisance professionnelle sans avertissement préalable au salarié. Cela signifie que l’employeur doit avoir informé le salarié de son insuffisance professionnelle par un blâme, un avertissement, ou un rappel à l’ordre afin que ce dernier puisse réagir et corriger ses erreurs.
Si l’employeur ne constate aucun changement, il peut alors envisager le licenciement. Il doit alors respecter la procédure de licenciement classique.
⚠️ Attention : lorsque le salarié est protégé par une clause de garantie d'emploi, l'employeur ne peut pas le licencier pour insuffisance professionnelle (sauf si ce type de licenciement est exclu par la clause).
Étape 1 : La convocation à un entretien préalable de licenciement
L’employeur doit tout d’abord convoquer le salarié à un entretien préalable au licenciement. Il doit lui transmettre la convocation par lettre recommandée avec avis de réception, ou lui remettre en main propre contre décharge au moins 5 jours ouvrables avant la tenue de l’entretien.
Le délai commence à courir à compter du lendemain de la notification de la convocation, et se termine la veille de la date de l’entretien.
💡 Bon à savoir : les jours fériés, chômés, et les dimanches ne sont pas des jours ouvrables.
Ce délai entre l’envoi de la convocation à l’entretien préalable de licenciement et la tenue de l’entretien permet au salarié d’organiser sa défense et de choisir une personne pour l’assister lors de l’entretien s’il souhaite être assisté.
Étape 2 : L’entretien préalable de licenciement
L’entretien préalable de licenciement permet à l’employeur d’exposer les motifs pour lesquels il souhaite licencier le salarié, et de recueillir ses explications et observations.
Durant l’entretien, le salarié peut être assisté par :
la personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise ;
un conseiller du salarié inscrit sur la liste départementale (sauf dans les entreprises qui ont un CSE).
L’employeur peut également être assisté (uniquement si le salarié est assisté), par une personne appartenant au personnel de l’entreprise. Il peut décider de se faire représenter par une personne qui a une délégation de pouvoir au lieu d’aller à l’entretien lui-même, par exemple un DRH.
💡 Bon à savoir : lorsque le salarié ne se présente pas à l’entretien préalable, la procédure de licenciement suit son cours normalement.
Étape 3 : La notification du licenciement
L’employeur qui envisage toujours de licencier le salarié à l’issue de l’entretien doit lui notifier son licenciement. Il doit transmettre une lettre de licenciement au salarié, soit par courrier recommandé avec avis de réception, soit par remise en main propre contre décharge.
La lettre de licenciement pour insuffisance professionnelle doit indiquer de manière précise les motifs du licenciement, et notamment les tâches qui relèvent de la qualification du salarié que ce dernier n’a pas été en mesure de réaliser.
La lettre de licenciement pour insuffisance professionnelle ne peut être remise qu’après un délai de 2 jours ouvrables suivant la tenue de l’entretien.
Dans un délai de 15 jours suivant la notification du licenciement, le salarié peut demander à l’employeur une précision des motifs du licenciement. Il fait sa demande par lettre recommandée avec avis de réception, ou par courrier remis en main propre contre décharge.
L’employeur dispose de 15 jours pour répondre au salarié et préciser les motifs. Toutefois, il ne peut pas ajouter de nouveau motif, ou modifier ceux évoqués dans la lettre de licenciement, il ne peut que les préciser.
L’employeur peut également décider de préciser les motifs du licenciement de sa propre initiative, sans que le salarié en fasse la demande. Il doit alors envoyer une lettre recommandée avec avis de réception, ou remettre un courrier en main propre contre décharge au salarié, dans les 15 jours suivants la notification du licenciement.
Étape 4 : Le préavis de licenciement
Lorsque le salarié est licencié, il doit effectuer un préavis de licenciement avant la rupture de son contrat de travail. La durée du préavis de licenciement peut être prévue :
dans la convention collective applicable à l’entreprise ;
dans le contrat de travail du salarié ;
à défaut, il est fixé par la loi.
💡 Bon à savoir : l’employeur peut dispenser le salarié d’effectuer son préavis, il doit alors lui verser l’indemnité compensatrice de préavis. Lorsque le salarié est à l’origine de la demande de dispense de préavis, l’employeur n’a pas à lui verser l’indemnité compensatrice de préavis.
La dispense de préavis peut être totale ou partielle, elle peut donc être demandée par le salarié ou imposée par l’employeur même si le préavis a déjà commencé.
Étape 5 : La fin du contrat de travail
Le contrat de travail est rompu à la fin du préavis de licenciement. Lorsque le salarié est dispensé de la totalité de son préavis, le contrat de travail prend fin à la date de notification du licenciement. Si le salarié est partiellement dispensé de son préavis, le contrat de travail est rompu à la date indiquée (fin de la partie du préavis réalisée).
Une fois le contrat de travail rompu, l’employeur doit remettre au salarié les documents de fin de contrat :
attestation Pôle emploi ;
certificat de travail ;
reçu pour solde de tout compte ;
récapitulatif de l'épargne salariale.
💡 Bon à savoir : l’employeur n’a pas à transmettre les documents au salarié, il doit uniquement lui mettre à disposition. Le salarié doit alors venir les chercher. Cependant, l’employeur peut décider de les envoyer au salarié.
Quelles sont les indemnités à verser en cas de licenciement pour insuffisance professionnelle ?
Licenciement pour insuffisance professionnelle et indemnité : le licenciement pour insuffisance professionnelle ouvre droit au versement de certaines indemnités pour le salarié.
L’indemnité légale de licenciement est notamment due au salarié en cas de licenciement pour insuffisance professionnelle, tel que le prévoit le Code du travail. Pour déterminer le montant exact auquel le salarié a droit, consultez notre guide sur le calcul de l'indemnité de licenciement. Cependant, le salarié doit remplir les conditions de versement (notamment avoir 8 mois d’ancienneté au sein de l’entreprise).
L’employeur est également tenu de verser au salarié les différentes sommes afférentes à la rupture du contrat de travail. Il s’agit de :
l’indemnité compensatrice de préavis, si l’employeur a dispensé le salarié d’effectuer son préavis ;
l’indemnité compensatrice de congés payés, si le salarié a des congés payés restant au moment de son départ de l’entreprise ;
l'indemnité de clause de non-concurrence si le salarié est lié par une telle clause dans son contrat de travail.
💡 Bon à savoir : licenciement pour insuffisance professionnelle et chômage : le salarié licencié peut toucher des indemnités de chômage s’il remplit les conditions de versement.
Peut-on contester le licenciement pour insuffisance professionnelle ?
Concernant les délais de licenciement, tout salarié peut contester son licenciement dans un délai de 12 mois à compter de sa notification. Il doit alors saisir le conseil de prud’hommes, et peut notamment contester :
la procédure de licenciement ;
les motifs du licenciement ;
les indemnités versées à l’occasion du licenciement.
Si la procédure est seulement irrégulière, mais que le licenciement est justifié, l’employeur doit alors verser une indemnité qui ne peut excéder un mois de salaire.
En revanche, lorsque le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, l’employeur peut être condamné à verser une indemnité dont le montant varie selon l’ancienneté du salarié.
Il est recommandé à l’employeur qui souhaite licencier un salarié pour insuffisance professionnelle d’être vigilant en s’assurant que le salarié remplisse les conditions du licenciement pour insuffisance professionnelle, et en suivant toutes les étapes de la procédure.